Il y a quelques mois, les résultats d’une expérience menée par une équipe de scientifiques de différentes institutions universitaires françaises ont été rendus publics. Ces résultats sont liés à la transmission des ondes de l’eau (c’est-à-dire des vagues) et au concept d’«absorption parfaite», ou son dérivé «l’absorption cohérente parfaite». L’absorption parfaite, dans le contexte scientifique, désigne la capacité d’un matériau à absorber tous les rayonnements qui lui parviennent (les ondes sont également une forme de rayonnement), à une fréquence ou une gamme de fréquences donnée. Par exemple, un matériau absorbant parfaitement le son absorberait idéalement 100 % du son incident, c’est-à-dire qu’il ne réfléchirait ni ne transmettrait aucune partie de cette fréquence spécifique ou de cette gamme de fréquences.

En revanche, l’absorption cohérente parfaite va plus loin : elle se passe de la médiation de ce matériau imaginaire et permet de contrôler les ondes par une interaction directe avec d’autres ondes, qu’il s’agisse d’ondes lumineuses avec des ondes lumineuses, de vagues avec des vagues, d’ondes sonores avec des ondes sonores, et ainsi de suite. Il s’agit en fait d’un concept théorique dans le domaine de la physique qui implique la capacité de contrôler des ondes par l’interaction directe d’ondes cohérentes, c’est-à-dire d’ondes dont les phases sont égales.

Agnès Maurel, physicienne mathématicienne à l’École supérieure de physique et de chimie industrielle (ESPCI) de Paris et membre de l’équipe de recherche, a expliqué à Physics Magazine que leur étude était motivée par «la nécessité de contrôler ou d’absorber les vagues dans les rivières ou de protéger les côtes». Il a également souligné que «absorber complètement l’énergie des vagues est encore mieux que de la rediriger», ajoutant que l’on pourrait aller plus loin et imaginer la possibilité de «récolter cette énergie». Il s’agit en tout cas d’une recherche qui a retenu notre attention en tant qu’entreprise impliquée dans la conception, l’architecture et la construction de parcs aquatiques, dans lesquels le contrôle des vagues dans l’eau, par exemple dans les piscines à vagues, est précisément un enjeu décisif. Voyons en quoi consiste cette recherche.

Sur la base de calculs mathématiques, Maurel et l’équipe de recherche ont démontré qu’une absorption parfaite des vagues dans l’eau pouvait être obtenue par l’ingénierie d’un type particulier de «structure résonante». La structure consistait initialement en un canal d’eau avec deux cavités. Ses calculs préliminaires, qui considéraient un fluide idéal sans pertes d’énergie par frottement, ont montré que ces deux petites cavités agiraient comme des chambres de résonance avec l’effet d’une absorption cohérente parfaite des ondes. Ces calculs ont été effectués pour un canal d’eau de 1,4 m de long, 6 cm de large et 5 cm de profondeur, tandis que les deux cavités étaient de taille identique, avec une longueur perpendiculaire à la paroi du canal de 4 cm et une largeur le long du canal de 3 cm. Avec ces paramètres, les opérations prévoyaient une transmission d’ondes nulle dans la gamme de fréquences de 2,7 à 3,3 Hz.

En testant leurs prévisions en laboratoire, les chercheurs ont constaté deux creux dans la courbe de transmission des vagues d’eau réelles en fonction de leur fréquence : le premier creux était presque nul, tandis que le second atteignait une réduction d’énergie d’environ 40 %. Selon les scientifiques, ces divergences avec les calculs théoriques reflètent les pertes par frottement dans le fluide, ainsi que le fait qu’il s’agit d’une approximation.

Enfin, par tâtonnements, Maurel et ses collègues ont découvert qu’avec l’asymétrie des deux cavités, dans la mesure où l’une s’étendait plus loin de la paroi du canal que l’autre, on obtenait une absorption parfaite à 2,9 Hz, c’est-à-dire une transmission et une réflexion nulles à cette fréquence. La structure résonante garantissait alors une interaction entre les ondes entrantes et les ondes réfléchies, ce qui entraînait leur annulation parfaite. Ainsi, comme on peut le lire dans l’étude, «le contrôle de la propagation des ondes d’eau guidées est démontré expérimentalement, numériquement et théoriquement (…)». En corollaire à leur découverte, les chercheurs soulignent qu’elle pourrait être utilisée pour développer un système pratique de protection des côtes contre l’érosion.

Voici les auteurs de l’étude : Leo-Paul Euvé, du laboratoire Physique et Mécanique des Milieux Hétérogènes de l’ESPCI ; Kim Pham, de l’École Nationale Supérieure de Techniques Avancées ; Philippe Petitjeans, de l’ESPCI ; Vincent Pagneux, du Laboratoire d’Acoustique de l’Université du Maine, en collaboration avec le Centre National de la Recherche Scientifique ; et Agnès Maurel, de l’Institut Langevin de l’ESPCI.

Pour les physiciens et les mathématiciens parmi vous, l’article complet de l’étude est disponible ici : ResearchGate.

Sources: Physics Magazine, Physical Review Letters, Wikipedia. Images: Physical Review Letters.

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