Nous vous proposons de savourer la voix claire dans les idées et le talent pratique et sûr de cette éminente exécutive et consultante stratégique dans le secteur international de l’hôtellerie. Avec une carrière solide dans le leadership d’équipes et le repositionnement de marques de premier plan comme Barceló ou Sofitel, ou encore dans le parc à thème Motiongate de Dubaï, Raquel López a démontré une capacité exceptionnelle à gérer des propriétés et des franchises dans des environnements multiculturels. Des marchés aussi compétitifs que ceux du Moyen-Orient l’ont conduite à la transformation d’entreprises, l’optimisation de marques, le développement de stratégies marketing, la gestion des talents… Mais laissons-la vous le raconter. Vous allez apprécier.
Amusement Logic : Après vos études en direction d’entreprises, vous vous êtes spécialisée en « Hotel Management and Owner Relations » (Gestion Hôtelière et Relations avec la Propriété). Était-ce une nécessité sur le marché ou une évolution personnelle ?
Raquel López : Je dirais que c’était une combinaison des deux. J’ai commencé ma carrière professionnelle dans l’hôtellerie lorsque j’ai déménagé en Turquie pour des raisons personnelles. C’est là que ma passion pour le secteur hôtelier et le divertissement a commencé.
Au fil du temps, j’ai constaté que la relation entre la propriété et la gestion hôtelière est un point critique pour la durabilité de tout projet. Par ailleurs, ma propre curiosité et mon désir d’apprendre m’ont poussée à approfondir un domaine où je pouvais apporter une valeur différenciante.
En fait, j’ai récemment suivi la spécialisation en Hotel Management and Owner Relations à l’Université Cornell, car j’ai ressenti le besoin de revenir aux études pour comprendre ce métier d’un point de vue académique et analyser la gestion hôtelière également du côté de la propriété.
A.L. : Vous avez dirigé des équipes et projets en Espagne, en Turquie et, surtout, pendant plus d’une décennie, au Moyen-Orient. Quels ont été les défis et quelle philosophie de gestion avez-vous développée pour atteindre vos objectifs ?
R.L. : Les plus grands défis étaient liés à l’adaptation à des contextes culturels très divers, à des dynamiques de marché différentes et à des modèles d’affaires en constante évolution. Travailler en Europe et au Moyen-Orient implique de comprendre des mentalités, valeurs et priorités très différentes, et de transformer ces différences en forces.
Ma philosophie de gestion repose sur quatre piliers : respect de la diversité, écoute active, compréhension culturelle et générationnelle, et clarté dans la communication. Il est essentiel pour moi d’avoir un objectif commun que tous sentent comme le leur, car lorsqu’une équipe s’identifie à la mission, l’énergie et l’engagement se multiplient.
A.L. : En tant que vice-présidente des ventes et du marketing pour les États arabes du Golfe chez Barceló ou Sofitel, votre mandat était clair : repositionner et optimiser les marques. Quelle a été votre stratégie de repositionnement et comment avez-vous mesuré son succès ?
R.L. : Ma stratégie a commencé par une compréhension approfondie des attentes des clients, tant régionales qu’internationales, sur des marchés très compétitifs. Comprendre ce que chaque marché et segment attendait, tout en identifiant le différentiel de chaque marque et propriété, était essentiel pour construire des propositions solides.
À partir de là , nous avons redéfini la proposition de valeur, renforcé la cohérence de la narration de marque, optimisé la distribution et la visibilité digitale, et resserré les relations avec des partenaires stratégiques.
Le succès a été mesuré non seulement par les résultats financiers —augmentation du RevPAR et de l’EBITDA—, mais également par les indicateurs de satisfaction client et de recommandation de marque, confirmant que nous étions sur la bonne voie.
A.L. : Chez Yas Plaza Hotels, vous avez dirigé la transition d’un modèle de gestion multiple à une structure unique avec franchises. Quels ont été les principaux obstacles opérationnels et culturels et comment les avez-vous surmontés ?
R.L. : Le plus grand obstacle était de changer les mentalités et de construire une vision commune. Il fallait briser les silos que chaque opérateur avait créés avec ses propres intérêts, pour créer une destination unique, où les anciens concurrents deviennent alliés et où la synergie des équipes génère de la valeur pour tous.
Passer d’une vision centrée sur chaque hôtel à une gestion intégrée sous différentes marques a nécessité beaucoup de communication interne, ainsi qu’une harmonisation des procédures et systèmes de travail. Nous avons surmonté cela en créant une structure claire, avec des KPIs partagés et des plans de formation permettant aux équipes d’adopter le nouveau modèle.
La transition vers un modèle de franchise a également exigé de combiner la valeur de chaque marque et de maintenir d’excellentes relations avec les franchisés, pour tirer le meilleur de chacun sans cannibaliser les résultats.
A.L. : Chez Dubai Parks & Resorts, vous avez créé de toutes pièces la division marketing de Motiongate. Comment construit-on une stratégie de marque et de marketing sans historique de données et comment l’aligne-t-on sur les attentes d’un investissement majeur ?
R.L. : Motiongate était une nouvelle marque, mais avec l’avantage —et le défi— d’être basée sur des Propriétés Intellectuelles de premier plan mondial comme DreamWorks, Columbia Pictures, Smurfs et Lionsgate. Cela nous a permis de créer une proposition aspirationnelle avec un grand pouvoir d’attraction, mais nécessitait aussi un soin extrême pour respecter et valoriser chaque franchise dans un même parc.
La stratégie s’est construite avec un talent international à tous les niveaux, combiné à des études de marché pour comprendre les attentes du public régional et international, et une narration de marque intégratrice alignant les attentes des investisseurs et partenaires.
Nous avons défini un plan de lancement puissant impliquant tous les stakeholders comme partenaires, avec des plans stratégiques et tactiques dès le premier jour, garantissant que l’investissement se traduise par notoriété globale et fréquentation durable.
A.L. : Selon votre expérience chez STAFF Hotel, quels sont les principaux défis pour retenir et gérer les talents dans un secteur fortement externalisé ?
R.L. : Le défi est double : pénurie de ressources et forte rotation dans les postes opérationnels. La forte demande de personnel hôtelier entraîne des changements fréquents, impactant la continuité et la qualité du service. De plus, le manque de profils formés ajoute de la pression dans un secteur où les standards sont élevés.
Nous avons travaillé sur trois fronts : stabilité de l’emploi, formation continue et optimisation des processus, et surtout sens d’appartenance même dans des modèles externalisés.
Reconnaître la valeur de chaque personne et motiver les équipes est clé pour assurer la qualité dans un environnement compétitif.
A.L. : Depuis votre position chez Insight Out Consultancy, quelles capacités les entreprises de loisirs et tourisme doivent-elles développer aujourd’hui pour leur résilience face aux défis globaux ?
R.L. : Trois clés : une digitalisation intelligente connectée à la stratégie pour des décisions rapides et basées sur les données ; diversification et flexibilité pour réduire la dépendance à un marché ou canal unique ; et une gestion agile des talents pour former des équipes capables de s’adapter aux changements constants. En somme, la résilience naît de la combinaison de technologie, de personnes et d’une culture ouverte à l’apprentissage continu.
A.L. : En tant que consultante, quels aspects de votre expérience opérationnelle sont les plus précieux pour identifier et résoudre les défis de vos clients ?
R.L. : Mon expérience opérationnelle me permet de comprendre la complexité de diriger un hôtel, un parc ou un groupe de propriétés. J’ai vécu la pression sur les résultats, la coordination avec de multiples stakeholders et la gestion d’équipes multiculturelles. Cela m’offre une vision pratique et réaliste : je sais ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Comme consultante, cette expérience se traduit par de l’empathie et des solutions praticables, non théoriques. Je peux identifier rapidement les points critiques et proposer des solutions adaptées au contexte et aux ressources réelles de chaque client.
A.L. : Au cours de votre carrière, vous avez pris des décisions cruciales concernant plusieurs propriétés et marques. Pourriez-vous partager l’une des plus difficiles et le processus pour y parvenir ?
R.L. : Difficile de choisir, mais l’une des décisions les plus ardues fut le repositionnement de la marque Sofitel en Égypte, visant à élever l’expérience de marque vers le luxe. Cela impliquait des changements drastiques dans le portefeuille de partenaires, fournisseurs et clients, avec des sacrifices à court terme et une certaine résistance initiale.
Le processus a nécessité une analyse de marché approfondie, un benchmarking avec les concurrents de référence, et surtout une communication transparente avec les équipes et les stakeholders pour redéfinir le modèle d’affaires et aligner les attentes. La formation des équipes a été essentielle pour adopter le nouveau standard de luxe dans chaque détail. Une décision complexe, mais couronnée de succès.
A.L. : Avec un parcours aussi inspirant, quel conseil donneriez-vous aux nouvelles générations aspirant à des postes de leadership stratégique dans l’hôtellerie et la consultance internationale ?
R.L. : Cultivez la curiosité et la capacité d’apprentissage continu. Le secteur évolue rapidement, et ceux qui s’adaptent et apprennent avec agilité font la différence. Diriger, ce n’est pas seulement prendre des décisions, c’est écouter, comprendre et motiver les équipes.
Cherchez toujours un objectif commun que tous ressentent comme le leur, car les meilleurs résultats naissent de personnes engagées et passionnées.
Dirigez avec authenticité : être véritable inspire plus que n’importe quel discours. Et surtout, trouvez quelque chose que vous aimez réellement, où vous pouvez être vous-même, car la passion se voit et fait la différence.


